Comment expliquer le « massacre des missionnaires » ? 23 avril 2007
Posted by Acturca in Religion, Turkey / Turquie.Tags: Turkey / Turquie
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Courrier international (France), 19 avr. 2007
Pierre Vanrie
Dans son ensemble, la presse turque dénonce l’assassinat de trois chrétiens évangéliques, survenu le 18 avril à Malatya. Mais le quotidien islamiste Zaman y voit une provocation liée à l’élection présidentielle, prévue en juin 2007.
« Le cauchemar se poursuit », titre le quotidien Milliyet en première page, « Massacre de missionnaires », écrit le journal Radikal, « Trahison », titre le quotidien Star. Ces quelques couvertures traduisent l’écœurement et l’inquiétude qui ont saisi la presse turque au lendemain du meurtre, à Malatya (est du pays), de trois individus de confession chrétienne, dont un Allemand, travaillant pour une maison d’édition chrétienne, égorgés par plusieurs étudiants turcs.
Ali Bulaç du quotidien Zaman, n’hésite pas à faire le lien, dans un éditorial intitulé « Une provocation annoncée », entre ce triple meurtre et la tension liée à l’élection présidentielle turque et entretenue, selon lui, par ceux qui ne veulent pas voir le Premier ministre Erdogan devenir président au prétexte que la République serait alors menacée. « Cela fait des semaines que l’on nous disait : ‘Vous allez voir, plus l’échéance des élections se rapprochera, plus les provocations seront importantes. […] Imaginez donc l’image de la Turquie à l’étranger : trois missionnaires chrétiens assassinés à Malatya – la ville natale de Mehmet Ali Agca, celui qui a tiré sur le pape – peu de temps avant, le meurtre du journaliste arménien Hrant Dink et celui, encore avant, du prêtre italien, le père Santoro à Trabzon.' » Pour l’éditorialiste de Zaman, « il ne fait donc aucun doute qu’il s’agit d’une provocation ». Il est peu probable que le Hizbullah (organisation sunnite radicale, qui n’a rien à voir avec le Hezbollah libanais, recrutant essentiellement auprès des islamistes kurdes et qui aurait été manipulée dans la lutte contre le PKK) soit derrière ce meurtre, poursuit Ali Bulaç. « Dès lors que ce groupe est très affaibli, qu’il a annoncé avoir mis un terme à ses activités et qu’il ne rentre pas dans la catégorie des organisations islamistes s’en prenant aux non-musulmans. »
Pour Mehmet Barlas du quotidien Sabah, l’affaire ne se soldera pas simplement avec une condamnation du meurtre et l’arrestation de ses auteurs. « En effet, écrit-il, il est temps que tous ceux qui parlent au nom de l’Etat et pour les différentes tendances de la société civile, procède à une autocritique vis-à-vis de tout ce qui concourt à créer cette atmosphère de violence et de haine. Il convient donc, comme on ne l’a pas encore fait à propos du meurtre de Hrant Dink d’ailleurs, d’aller au fond des choses et de s’en prendre aux responsables de cette intolérance. Sinon, nous nous contenterons à nouveau de dénoncer ces meurtres en attendant les suivants. »
« Toujours les mêmes questions qui reviennent » écrit, indigné, Hasan Cemal dans Milliyet. « Comment un tel fanatisme raciste et religieux a-t-il donc pu prospérer dans notre pays ? Nous ne parvenons décidément pas à sortir de ce marécage. Nous sommes toujours incapables d’appliquer au niveau de l’Etat et de la société les principes de base de la démocratie et des droits de l’homme. »
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