Ankara fait un geste envers la communauté alévie 25 janvier 2008
Posted by Acturca in Religion, Turkey / Turquie.Tags: alévis, Ali, Cem, cemevi, Erdogan, Muharrem, Raffi Hermon, sema, Turkey / Turquie
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Le Temps (Suisse), 25 janvier 2008
Delphine Nerbollier, Istanbul
Premier signe d’ouverture envers la communauté musulmane hétérodoxe. Le jeûne du mois de Muharrem vient de se terminer. Durant douze jours, la communauté alévie de Turquie a observé une période de deuil, à la mémoire de Hussein, petit fils du prophète Mahomet, assassiné en680. Durant cette période, peu après 17 heures, plus de 150 personnes, en majorité des femmes et des enfants, sont venues rompre le jeûne dans le sous-sol de la fondation Cem, à Gazi, dans les faubourgs d’Istanbul. Sur les plateaux distribués gratuitement, un repas frugal, sans eau ni viande, composé de riz, de haricots blancs.
Cette année, la discussion tourne autour de la participation du premier ministre, Recep Tayyip Erdogan, à l’un de ces repas, le11 janvier, dans un grand hôtel d’Ankara. Ce geste est le premier signe vraiment sérieux d’une ouverture de l’Etat envers cette communauté musulmane hétérodoxe qui vénère Ali, le gendre du prophète, mais ne jeûne pas durant le mois de Ramadan, ne fait pas le pèlerinage à La Mecque et, au lieu d’aller à la mosquée, se rend chaque jeudi dans des cemevis où est pratiquée la danse sacrée du sema. Cette communauté connue pour son modernisme, représenterait entre 10 et 20% de la population turque.
Or ce soir-là, dans la cemevi de Gazi, le geste du premier ministre suscite les suspicions du comptable, Hashim Karaca. «Ce que nous demandons à l’Etat laïc, c’est de nous reconnaître officiellement. Nous payons des impôts comme tout le monde mais est-ce normal que l’Etat finance uniquement la construction de mosquées et qu’il ne nous donne pas un sou pour nos cemevis? Lorsque Erdogan passera aux actes, nous le prendrons au sérieux. En attendant, il cherche nos voix tout en continuant sa politique de sunnisation.»
Tabou brisé
Preuve de cette suspicion, très peu d’associations ont participé à la rupture du jeûne aux côtés d’Erdogan. Pourtant, celui-ci est sans conteste le premier à s’être autant engagé sur la question. «C’est une première dans l’histoire de la République, note Raffi Hermon de l’Association des droits de l’homme de Turquie. Et le plus étonnant, c’est que ce geste est réalisé par un gouvernement musulman et non par les laïcs. Mais cela ne signifie pas que les réformes demandées seront passées facilement. Au contraire, je pense que les chrétiens de Turquie obtiendront des avancées plus rapides car ils ne sont que 100 000 et offrent une belle vitrine pour la Turquie vis-à-vis de l’Union européenne. Les alévis eux, sont, plus de 10 millions.»
Sincère ou pas, le pouvoir vient en tout cas de briser un tabou, perturbant une communauté connue pour ses accointances avec la gauche qu’avec les partis à base religieuse.
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