Coup d’envoi de la « Synergie de la mer Noire » 18 février 2008
Posted by Acturca in Caucasus / Caucase, EU / UE, Russia / Russie, South East Europe / Europe du Sud-Est, Turkey / Turquie.Tags: Benita Ferrero-Waldner, BSEC, EU / UE, Fabrizio Tassinari, Forum de la mer Noire, GUAM, Mer Noire, Organisation de coopération économique de la mer Noir, Russia / Russie, synergie de la mer Noire, Turkey / Turquie, Ukraine
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Europolitique, N° 3470
14 février 2008
La commissaire Benita Ferrero-Waldner (Relations extérieures/Politique européenne de voisinage) participe le 14 février à Kiev à la première réunion de la synergie de la mer Noire (SMN) réunissant les ministres des Affaires étrangères de l’UE et leurs homologues de la région de la mer Noire. La SMN, initiative lancée en avril 2007, vise à renforcer la coopération dans la région et entre l’UE et les pays de la région (Grèce, Bulgarie, Roumanie, Moldavie, Ukraine, Russie, Géorgie, Arménie, Azerbaïdjan et Turquie). Elle retient treize domaines de coopération et doit rapprocher l’UE des organismes régionaux dont l’Organisation de coopération économique de la mer Noire (lire l’entretien page 20). La réunion est coprésidée par l’UE et l’Ukraine et doit déboucher sur une déclaration de coopération.
Une réunion ministérielle spéciale de l’organisation de coopération économique de la mer Noire se déroulera en présence de Mme Ferrero-Waldner et des présidences actuelle (slovène) et future (française). Une déclaration sur l’avenir des relations entre l’UE et l’organisation devrait y être adoptée.
Entretien avec Fabrizio Tassinari, expert de la région de la mer Noire : « Synergie de la mer noire » : les pays concernés ont des points de vue divergents
Fabrizio Tassinari, assistant en sciences politiques à l’Université de Copenhague, évalue les premiers résultats et l’impact potentiel de la Synergie de la mer noire, une initiative lancée par la Commission européenne en avril 2007 et dont l’objectif est de développer la coopération au sein de la région de la mer Noire elle-même, ainsi qu’entre la région et l’UE. Elle sera débattue lors d’une réunion ministérielle, le 14 février à Kiev. M. Tassinari est l’auteur du livre intitulé « A synergy for Black Sea Regional Cooperation » (CEPS, 2006) et il prépare un nouveau livre qui expliquera pourquoi l’Europe craint ses voisins.
Comment évaluez-vous la communication de la Commission sur la Synergie de la mer Noire, près d’un an après sa publication ? (avril 2007) ?
Je pense que la communication est arrivée trop tard. Le grand problème de la Synergie est que sa mise en oeuvre dépend de moyens et de ressources qui ont déjà été alloués au sein du contexte politique existant. Certains efforts conjoints de financement sont prévus pour cette initiative, mais jusqu’ici le processus global d’application est ralenti à cause du manque de moyens. La volonté politique est donc de les accroître.
Voulez-vous dire qu’il serait préférable de prévoir un budget séparé uniquement pour la Synergie ?
Cela eut été préférable, mais il a toujours été évident qu’il n’y avait pas de ressources complémentaires pour le moment. On peut déplorer aussi l’absence à Bruxelles d’une sorte de lobby de la mer Noire, comme celui qui existe pour la région méditerranéenne ou pour les pays d’Europe du Nord. Ce lobby aurait pu demander plus de financement ou une accentuation politique de l’importance de la région.
Entendez-vous par là que la Synergie n’intéresse pas les pays de la région ?
D’un côté, il y a la Bulgarie et la Roumanie, nouveaux Etats membres, qui ont intérêts à promouvoir la région de la mer Noire pour la simple raison que c’est là que leur contribution à la politique étrangère compte vraiment. Il en va de même pour la Grèce et même pour la Turquie. Le problème est que les pays côtiers ont des intérêts concurrentiels en ce qui concerne le développement de la région. La Turquie et la Grèce, par exemple, ont intérêt à ce que le développement de la région de la mer Noire se fasse via la Coopération économique de la mer Noire (BSEC). De l’autre côté, il y a la Roumanie avec son Forum de la mer Noire ainsi que l’Ukraine et la Géorgie avec sa Communauté du choix démocratique et le GUAM, qui regroupe la Géorgie, l’Ukraine, l’Azerbaïdjan et la Moldavie. L’intérêt de ces pays dans la région va de soi, mais leurs visions sont concurrentielles.
Pensez-vous que la prochaine réunion à Kiev aidera à les rapprocher de la Synergie ?
Comme il arrive souvent dans ce genre de sommets, il ne faut pas en attendre grand chose en termes d’avancée législative réelle. Mais j’espère que la réunion démontrera l’augmentation de l’intérêt de tous les pays concernés dans la création d’une plate-forme commune pour développer des projets communs.
La réunion de haut niveau qui doit lancer la Synergie aura lieu près d’un an après la publication de la communication. S’agit-il d’un signe inquiétant ?
La lenteur au démarrage n’est assurément pas un bon signe. Mais, la Commission a toujours été claire sur le fait que ce type d’initiative ne peut réussir que si les pays de la région s’impliquent et sont actifs. L’Ukraine, la Géorgie et même la Roumanie émergent à peine de plusieurs années de graves turbulences intérieures qui ont freiné leurs actions nationales. Le fait que la réunion se déroule au moment de la transition gouvernementale en Ukraine et après les élections en Géorgie peut promettre un accueil plus réceptif dans la région.
La Russie, pays de la mer Noire et concurrent principal de l’UE dans cette région, surtout pour l’énergie, montre-t-elle une attitude coopérative à l’égard de la Synergie ?
La Russie n’apprécie pas certains éléments de la Synergie. L’idée qu’une Synergie de la mer Noire devrait promouvoir la diversification de l’approvisionnement énergétique visée par l’UE est une chose que la Russie ne voit pas d’un oeil positif. De même, je suis personnellement assez sceptique quant à l’inclusion de la résolution des conflits gelés comme un élément possible de la Synergie. Ce sont des questions qui ne peuvent être traitées dans un contexte aussi pan-régional, avec la Russie du côté de la confrontation plutôt que de la coopération. D’autre part, la Russie, au même titre que les autres pays de la région, a intérêt à faire évoluer la coopération dans des domaines moins sensibles comme l’environnement, les transports, la lutte contre le crime organisé ou les trafics.
Quels sont les éléments les plus prometteurs de la nouvelle synergie ? Quels éléments manquent encore ?
Ce qui est prometteur c’est un mécanisme extrêmement flexible. Le signal envoyé par la Commission selon lequel la BSEC est l’organisation la plus importante dans la région est positif. Ce qui est prometteur c’est que la Synergie sera développée en collaboration avec d’autres organisations ou pays opérant dans la région, dont les Etats-Unis et l’OTAN. Ce qui est prometteur aussi c’est que les questions de démocratie, d’aide à la société civile et de sécurité intérieure sont incluses dans la Synergie. Parallèlement, on peut déplorer une mise en oeuvre aussi lente. Mais comme je l’ai dit, c’est une question de politique interne à l’UE, selon moi, et la Commission ne peut pas vraiment en être tenue pour responsable.
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