La fiancée d’un sans-papiers relaxée 24 mars 2008
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Libération (France), 19 mars 2008, p. 17
Carole Rap, Envoyée spéciale à Lyon
« Je ne comprends pas pourquoi tout ce cauchemar, dit Nuray d’une voix blanche. « Vous êtes prévenue pour aide au séjour irrégulier d’une personne sans titre de séjour », lui rappelle la présidente du tribunal correctionnel de Lyon (Rhône). « C’est mon compagnon », répète Nuray. « Oui, on a bien entendu », répond la présidente.
A-t-elle compris hier que la justice avait fait fausse route en poursuivant Nuray, femme française d’origine turque ? Son fiancé Abdullah, turc d’origine kurde, sans papiers, a été contrôlé et interpellé mi-novembre 2007 à l’aéroport de Lyon-Saint-Exupéry (Libération du 18 février). Il a expliqué à la Police aux frontières (PAF) qu’il était venu attendre Nuray, avec qui il allait se marier le 24 novembre. Nuray revenait d’un court séjour en Turquie, avec, dans sa valise, sa robe de mariée. Placée en garde à vue à sa descente d’avion, elle en est sortie avec une convocation au tribunal le 18 mars.
Immunité pénale. Le jour prévu pour leurs noces, le fiancé était expulsé vers la Turquie. « Vous viviez depuis combien de temps avec lui ? » s’enquiert la présidente. « On s’était rencontrés il y a un an et demi, et on vivait ensemble depuis neuf mois », répond Nuray. Cette Nîmoise de 33 ans, divorcée, explique comment, pour son fils de dix ans, « Abdullah, c’était comme son papa ». C’en est assez pour la procureur, qui demande la relaxe : « Les réquisitions seront brèves. Dès la première audition [par la police, ndlr], les deux ont indiqué qu’ils étaient concubins. La loi prévoit l’immunité pénale dans ce cas. » L’avocate de Nuray, Me Myriam Matari, fustige « un officier de police judiciaire qui ne connaît pas la loi ». Puis s’en prend aux « professionnels qui ont vu ce dossier et n’ont pas porté une analyse juridique mais une analyse morale ». Me Matari remet aux juges un livret où Nuray a relaté en photos son amour avec Abdullah. « Vous avez quelque chose à rajouter ? » demande la présidente à Nuray. « Je n’ai pas la tête sur les épaules, je suis épuisée, je le vis très mal. »
Applaudissements. Nuray est relaxée cinq minutes plus tard, sur la base de l’article L 622-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (Ceseda), dans lequel il est indiqué que le délit d’aide au séjour irrégulier ne peut donner lieu à des poursuites pénales pour des personnes ayant un lien familial ou de concubinage avec l’étranger. Applaudissements dans la salle d’audience, où plusieurs dizaines de personnes de la Cimade de Lyon et de Montpellier, du Collectif des amoureux au ban et du Réseau éducation sans frontière sont venus soutenir la jeune femme. « Quatre mois d’angoisse, la souffrance pour son fils, pour elle, la garde à vue, le besoin de se justifier, les conséquences physiques. On ne peut pas juste se contenter de ne pas être condamné », commente Me Matari à la sortie. Avec Nuray, elle compte lancer une action en responsabilité contre l’Etat pour faute.
« Elle n’aurait jamais dû être présentée devant le tribunal ! »
Le Progrès (France), 19 mars 2008, p. 9, Florent Clavel
Poursuivie pour « aide au séjour irrégulier » après avoir logé pendant neuf mois son concubin turc sans-papiers, Nuray O. a été relaxée, hier, par le tribunal correctionnel de Lyon
«Je me battrai jusqu’au bout. » Ce sont les mots de Nuray O., hier, à la sortie du tribunal de grande instance de Lyon. Elle a gagné un premier combat. Relaxée. La jeune femme de 31 ans, habitant Nîmes, comparaissait pour avoir facilité le séjour de son concubin sur le sol français, alors qu’il était en situation irrégulière.
« Elle n’aurait jamais dû être présentée devant le tribunal !, s’insurge un militant associatif. Ils allaient se marier et ils étaient concubins. Tous les deux auraient dû bénéficier de l’immunité prévue par la loi. » RESF, la Cimade et quelques anonymes sont venus soutenir Nuray.
Désormais, la jeune femme souhaite que l’Etat reconnaisse sa faute. Et paye pour le « cauchemar » qu’elle vit depuis quatre mois. Le 14 novembre dernier, Nuray atterrit à l’aéroport Saint-Exupéry. Elle revient de Turquie, les valises pleines à craquer. De quoi préparer le mariage annoncé le 24 novembre, avec son concubin turc Abdullah, qu’elle a rencontré en 2006. Elle a même ramené une robe de mariée, pour faire quelques économies. Lui, 26 ans, l’attend dans les couloirs de l’aéroport, bien qu’elle ait tenté de l’en dissuader. Car Abdullah n’a pas de papiers. Mais il tient à lui « faire une surprise ». Il n’en aura pas l’occasion.
Un contrôle de routine de la police de l’air et des frontières marque le début des ennuis pour le jeune couple. Abdullah est mis en garde à vue. Nuray, quant à elle, est « cueillie » dès sa sortie d’avion. « Je n’ai pas compris ce qui m’arrivait, explique-t-elle encore choquée. On m’a passé les menottes devant tous les passagers. J’ai été humiliée. » C’est une fois enfermée qu’elle comprendra pourquoi. Les policiers lui reprochent d’avoir aidé son concubin à rester sur le sol français, alors que sa carte de séjour n’est plus valable depuis plusieurs mois. « J’ai été fouillée de A à Z, ainsi que mes valises, poursuit la jeune femme. On a pris mes empreintes. Un policier m’a même dit : mais pourquoi tu n’as pas choisi d’être avec un Français ? »
Nuray est ensuite placée en garde à vue, pendant sept heures.
Abdullah, après avoir été retenu une semaine au centre de rétention de l’aéroport, a lui été expulsé le 24 novembre. « Le jour de notre mariage », s’indigne Nuray. Aujourd’hui en Turquie, Abdullah a été obligé d’intégrer l’armée : « Cela fait bientôt 20 jours que je n’ai plus de nouvelles. S’il lui arrive quelque chose, je tiendrai l’Etat français pour responsable. » Comment en est-on arrivé là ? « On a fait fi de tous les textes des droits de l’Homme, s’insurge son avocate, Me Matari. De l’officier de police judiciaire jusqu’au parquet, on n’a jamais appliqué le droit. »
salut je suis de tout coeur avce toi !!!je vis actuellement la meme situation courage!!