Le double jeu des Français est inexcusable 12 juin 2008
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Courrier International (France), 12 juin 2008, p. 41
Erdal Safak, Sabah (Istanbul)
Sarkozy ne veut pas de la Turquie en Europe. Mais il prend soin, à chaque alarme, de nous endormir avec de belles paroles, s’insurge le quotidien Sabah.
S’agissant de l’Europe, Nicolas Sarkozy n’a qu’une obsession : « La Turquie n’a pas sa place dans l’Union européenne parce qu’elle ne se trouve pas en Europe. C’est ce qu’on nous a appris à l’école », ne cesse-t-il de répéter à qui veut l’entendre. Et chaque fois que la Turquie fronce les sourcils en réaction à ce genre de déclarations, le président français s’empresse d’envoyer un de ses représentants à Ankara pour signifier qu’il n’y a là aucune mauvaise intention. C’est ce qui nous a valu l’intervention de Jean-Pierre Levitte, le conseiller de Sarkozy pour la politique extérieure, qui se veut rassurant : « Ne vous méprenez pas. Ne vous focalisez pas sur ces paroles. Regardons vers l’avenir. » Toutefois, il ne faut pas attendre longtemps pour que l’obsession de Sarkozy le reprenne. « Même si la Turquie remplissait tous les critères, cela ne résoudrait pas le problème », a-t-il déclaré en substance quelques semaines plus tard. La réaction turque est venue aussitôt. Et hop, un nouveau plombier français a pris la route d’Ankara. Cette fois, c’est le ministre des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, qui est venu nous expliquer que « les relations entre la Turquie et la France doivent être équilibrées et harmonieuses et correspondre aux intérêts stratégiques communs de ces deux grands pays dont les liens se sont renforcés au cours de l’Histoire ».
La tension était à peine retombée que Sarkozy insistait déjà pour décréter un embargo sur cinq chapitres des pourparlers d’adhésion en cours entre la Turquie et l’Union européenne. La raison ? Elle est simple : « Au bout de ces pourparlers, il y a l’adhésion. » Aussitôt dit, aussitôt fait : une nouvelle mission de conciliation est lancée, cette fois sous la houlette de Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d’Etat en charge des Affaires européennes. Ce dernier se veut également rassurant : « Ne vous tracassez pas ! Nous n’avons pas l’intention de nuire au bon déroulement des pourparlers d’adhésion. » De retour à Paris, cet « ambassadeur de bonne volonté » n’avait pas encore enlevé son manteau que Sarkozy a décoché une nouvelle flèche. Cette fois, le président français tente de faire retirer le terme de « participation » des documents de l’Union européenne en rapport avec la Turquie. Colère d’Ankara et nouvel émissaire français. C’est Pierre Lellouche, un ponte de l’UMP, qui s’y colle et qui annonce qu’il vient « pour ouvrir la voie à une nouvelle collaboration dans une perspective d’avenir ». Et ainsi de suite…
Sauf que maintenant, avec la dernière résolution votée par l’Assemblée nationale française, trop c’est trop. Dans le contexte des réformes institutionnelles, il est prévu de modifier la Constitution pour qu' »un référendum soit organisé en France en cas d’adhésion à l’Union européenne d’un pays dont le nombre d’habitants représente plus de 5 % de la population de l’Union ». C’est bien entendu la Turquie, et elle seule, qui est visée par ce nouveau critère. En effet, parmi les pays qui mènent les pourparlers d’adhésion, ou auxquels cette perspective a été proposée (Macédoine, Serbie, Monténégro, Albanie, Bosnie-Herzégovine, Kosovo), il n’y a que la Turquie dont la population dépasse les 5 % du total des habitants de l’Union européenne. En agissant de la sorte, les irréductibles ennemis de la Turquie en France n’ont pas voulu écouter les mises en garde de ceux qui leur disaient qu' »il ne serait pas possible de mener des pourparlers avec la Turquie dans ces conditions, et qu’on ne peut se comporter de cette façon avec un pays de 70 millions d’habitants ». En effet, un pays dont la fierté nationale est sensible et dont le passé est plus glorieux encore que celui de la France ne peut en aucun cas accepter d’être traité de la sorte. Tôt ou tard, la France paiera le prix de cette attitude inexcusable.
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