Les scientifiques musulmans. « L’islam est plus flexible sur la recherche scientifique » 4 novembre 2008
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La Croix (France), 4 novembre 2008
Dossier : Quel dialogue avec l’Islam ?
Istanbul, de notre correspondant
Les autorités religieuses musulmanes en Turquie approuvent les recherches sur les embryons humains.
«Les catholiques cherchent toujours la petite bête. Or, en Turquie, même dans les milieux les plus conservateurs, vous trouverez difficilement des gens qui s’opposent, par exemple, à la recherche sur des cellules souches embryonnaires. Si vous demandez à un vieil homme ce qu’il en pense, il vous répondra sûrement que, si c’est pour guérir les maladies, c’est bien. » Le docteur Seçkin Özen, chercheur au laboratoire Pakize Terzi d’Istanbul, résume le sentiment qui règne en Turquie à propos de certaines recherches scientifiques, en particulier sur l’embryon humain, qui provoquent de vives polémiques en Europe et aux États-Unis. Alors qu’elles sont suspendues dans de nombreux pays – l’Église catholique considère qu’elles portent atteinte à la dignité humaine -, plusieurs universités turques ont mené des projets dans ce domaine. En 2005, une équipe de chercheurs d’Istanbul a réussi à transformer des cellules souches embryonnaires humaines en cellules cardiaques.
« Ce développement a été freiné en 2005, car il n’y avait alors aucune législation à ce sujet. Le ministère de la santé a suspendu les projets dans l’attente d’une nouvelle loi », rapporte Necati Findikli, membre de la première équipe ayant développé les cellules cardiaques. « Mais cela n’a rien à voir avec les débats à caractère religieux comme on a pu en voir en Europe », souligne le jeune chercheur. En effet, la Direction des affaires religieuses, organe étatique qui contrôle tous les aspects de la pratique musulmane dans le pays, a approuvé la recherche sur les cellules souches provenant d’embryons humains.
À la différence des catholiques, les autorités religieuses musulmanes locales s’opposent seulement au clonage et aux grossesses issues de dons de sperme ou d’ovocytes, car elles impliqueraient des enfants nés hors mariage. Les recherches sur les embryons surnuméraires issus de la fécondation in vitro sont approuvées : « Les embryons ne faisant plus l’objet d’un projet parental seront de toute façon détruits. Ce n’est pas dans la logique de l’islam de ne rien faire devant la perte de quelque chose qui peut pourtant servir pour le bien de l’humanité », déclare Turan Güven, professeur en biologie à l’Université Gazi d’Ankara. Influent professeur en droit islamique, Hayrettin Karaman a lui aussi donné son accord dans les colonnes du journal conservateur Yeni Safak : « L’embryon surnuméraire qui n’est pas placé dans l’utérus de la mère ne pourra jamais naître en tant qu’être humain. Il peut donc être utilisé dans les recherches », avait-il écrit. « En Iran, pays à régime islamique, les recherches dans ce domaine sont financées par le gouvernement, rappelle Necati Findikli. Là-bas, les autorités religieuses les justifient en considérant que l’embryon n’a pas d’âme jusqu’à ce qu’il ait 120 jours. En Turquie, les positions diffèrent sur ce sujet, mais dans tous les cas, nous ne travaillons que sur des embryons qui n’ont pas encore cinq jours, donc incapables de s’attacher à l’utérus. »
Pour les chercheurs turcs, le Coran ne manque pas de phrases incitant à la recherche scientifique : « Partez à la recherche de la science même lorsqu’elle se trouve en Chine », ou encore « Nous n’avons créé aucune maladie sans remède, il vous incombe de le trouver. » Les études scientifiques, en particulier sur la génétique ou l’ingénierie, attirent de plus en plus de jeunes. Les meilleurs étudiants préfèrent ces domaines, qui nécessitent l’obtention d’une note élevée au concours national d’entrée à l’université. « Pour réussir ce concours, il faut absolument aller en école préparatoire, dont les meilleures dans ce domaine sont en général dirigées par des groupes conservateurs et orientent leurs élèves vers des cursus scientifiques », note Ömer, étudiant à Istanbul.
Toutefois, l’intégration des étudiants issus des milieux conservateurs ne se fait pas sans problème. « Certains étudiants refusent d’assister aux cours d’examen vaginal. J’en ai même vu qui avaient recouvert certaines parties de leur livre d’anatomie, raconte Serdar, étudiant en médecine. Mais si vous leur demandez leur avis sur les recherches embryonnaires, cela ne leur posera pas de problème… »
« La Turquie peut devenir un pays leader de la recherche sur les cellules souches, considère Seçkin Özen. L’opinion publique n’est pas contre ce sujet, et le pays possède des chercheurs brillants, ayant des contacts internationaux. » Et, ajoute Turan Güven, « l’islam est plus flexible sur la recherche scientifique, car notre croyance considère que sauver une vie équivaut au salut de l’humanité. »
Principaux apports des sciences islamiques Les sciences et techniques islamiques se sont développées au Moyen Âge et ont connu leur âge d’or du VIIe au XIVe siècle. L’alchimiste Ibn Hayyân (721-815) découvre les acides chlorhydrique et nitrique, la distillation et la cristallisation.
Principaux apports des sciences islamiquesLes sciences et techniques islamiques se sont développées au Moyen Âge et ont connu leur âge d’or du VIIe au XIVe siècle. L’alchimiste Ibn Hayyân (721-815) découvre les acides chlorhydrique et nitrique, la distillation et la cristallisation. Le mathématicien persan Al Khwârizmi (790-840) est un des inventeurs de l’algèbre (terme d’origine arabe), de l’analyse combinatoire et de la trigonométrie. Il précise que les « chiffres arabes » sont d’origine indienne. En 829, création à Bagdad du premier observatoire permanent au monde. Avicenne (980-1037), « prince des savants », écrit le Livre des lois médicales, dont l’influence durera jusqu’à la Renaissance. Les médecins perfectionnent l’anesthésie et l’analgésie, mettent au point la dissection et font progresser la pharmacopée. Le mathématicien et astronome persan chiite Al Biruni (973-1048) calcule le diamètre de la Terre et affirme, avant Copernic, que la Terre tourne sur elle-même.
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