Ankara est désormais incontournable 3 mars 2011
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Courrier International (France) 3 mars 2011, p. 17
Beril Dedeoglu, Star (Istanbul)
Les Européens et les Américains ont perdu leurs interlocuteurs dans le monde arabe. Seule la Turquie peut renouer le dialogue, estime un grand quotidien d’Istanbul.
Les dirigeants arabes qui ont pillé leur pays n’avaient pu le faire que parce qu’ils n’avaient cessé d’être courtisés, d’abord par les Européens, ensuite par les Etats-Unis et l’Union soviétique dans leur lutte pour dominer le monde. Or la situation a changé et les peuples n’acceptent plus ce genre de rapports datant du siècle dernier. Les tyrans ne peuvent plus faire fonctionner ce système. Mais, étrangement, les anciens partenaires de ces tyrans continuent de croire qu’ils vont encore pouvoir utiliser ces bonnes vieilles méthodes.
C’est ainsi que la France se focalise sur la Tunisie et se demande encore comment elle a pu perdre cette zone de cette façon. La Grande-Bretagne, quant à elle, manifeste à nouveau son intérêt pour l’Egypte et le canal de Suez. Pendant ce temps, l’éventuelle vague d’émigration venant d’Afrique du Nord vers l’Europe constitue la première préoccupation de l’UE, tandis que les Etats-Unis cherchent à identifier les islamistes radicaux parmi les masses qui se soulèvent. Les Russes, eux, veulent vendre des armes et les Chinois, enfin, pensent à leurs intérêts pétroliers. Ils agissent tous sur un fond d’inquiétude en se demandant si les nouvelles structures qui vont se mettre en place dans ces pays leur permettront encore d’y faire des affaires. Ils discutent entre eux pour savoir qui sera le plus acceptable de ces nouveaux dirigeants. Mais ils ont du mal à protéger leurs propres ressortissants. Le fait qu’une dizaine de pays aient fait appel à la Turquie pour évacuer leurs ressortissants coincés en Libye montre quels sont les pays qui se sont fourvoyés dans la région. A l’inverse, des chefs d’Etat arabes dont le trône est menacé sont remontés contre ceux qui les ont jadis soutenus avant de les lâcher. Dans ces conditions, tant les Européens que les Américains éprouvent d’énormes difficultés à négocier avec les équipes qui demeurent au pouvoir dans ces pays. Ce dialogue n’est pas plus facile avec les populations, qui savent quels sont en Occident les amis des dirigeants qui les tyrannisaient. Certes, il y a aussi dans la région des dirigeants et des peuples qui nourrissent des doutes sur la Turquie. Néanmoins, elle apparaît comme l’un des pays qui ont le moins de choses à se reprocher. Ankara peut donc nouer un dialogue aussi bien avec les peuples qu’avec les anciens et les nouveaux leaders. Cette situation inédite ouvre une nouvelle ère dans les relations entre la Turquie et l’UE. Ceux qui ne veulent pas de la Turquie dans l’Union européenne feraient bien de réfléchir aux conséquences d’une telle attitude.
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