Fin de partie pour l’armée turque 1 août 2011
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Le Figaro (France) no. 20838, lundi 1 août 2011, p. 19
Par Pierre Rousselin
En d’autres temps, cela aurait mené inévitablement à un coup d’État. La Turquie vient de connaître la démission en bloc de ses principaux chefs militaires, sans que le pays traverse la moindre crise politique.
Le chef d’état-major des armées, suivi des commandants de l’armée de terre, de l’air et de la marine, a jeté l’éponge en raison du désaccord persistant entre la hiérarchie militaire et les dirigeants de l’AKP, le parti islamique modéré au pouvoir depuis 2002.
Si leur geste n’a guère suscité de troubles, c’est parce que l’armée turque, qui se veut le pilier de la laïcité de l’État héritée de Kemal Atatürk, a fini par perdre la partie qui l’opposait depuis des années à l’AKP du premier ministre, Recep Tayyip Erdogan.
Avant l’arrivée au pouvoir de l’AKP, les militaires avaient conduit trois coups d’État depuis 1960, et réussi, en 1997, à évincer du pouvoir un parti islamiste auquel appartenait Erdogan.
S’appuyant sur les réformes voulues par l’Union européenne en vue de démocratiser la Turquie, l’AKP a pu assouvir sa volonté de revanche en menant une offensive vigoureuse contre le pouvoir de l’armée. Deux cent cinquante militaires, dont quarante généraux d’active (soit un sur dix), ont été mis en prison pour implication dans des complots prétendus contre le régime.
De nouvelles inculpations de généraux sont à l’origine des démissions de vendredi, qui illustrent l’impuissance de l’état-major face à la détermination du pouvoir politique.
Les législatives du 12 juin ont marqué un tournant majeur. Elles ont donné à l’AKP un troisième mandat consécutif, avec 50 % des suffrages, et fait d’Erdogan le maître absolu de la politique turque.
Le premier ministre, qui a récolté les fruits d’une croissance économique remarquable, va désormais pouvoir imposer des hommes à lui à la tête de l’armée et poursuivre son projet de réforme de la Constitution en faveur d’un système présidentiel.
Le départ de la « vieille garde » de l’état-major marque la prise de contrôle de l’armée par le pouvoir civil. Mais c’est aussi un nouveau succès pour les islamistes conservateurs de l’AKP, qui vont disposer de tous les leviers de commande en Turquie. Il leur reste à éviter les écueils d’un excès de confiance.
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