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Hussein Chalayan, le techno kid 27 août 2011

Posted by Acturca in Art-Culture, France.
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Télérama (France) no. 3215, samedi 27 août 2011, p. 15
Sortir Paris

Bénédicte Philippe

Au musée des Arts décoratifs, carte blanche au styliste londonien, qui met en scène ses créations postmodernes. Traversez le miroir !

Le plateau de l’exposition est plongé dans la pénombre. Les mannequins qui défilent sur les écrans vidéo projettent leurs trajectoires colorées. Dans les vitrines, sur les murs, des silhouettes. A l’entrée, le patron du modèle que Björk porte en 1995 sur la pochette de son album Post et la performance-concert réalisée avec la chanteuse turque Sertab Erener en 2010, I am Sad Leyla/Uzgünüm Leyla, donnent le ton : sur les écrans, l’ambiance arty n’a rien à voir avec le staccato survolté habituel des défilés. Le public, jeune, se démarque par son allure d’étudiants d’école d’art. Happé par le spectacle, rivé au livret de visite, chacun semble s’interroger, déconcerté. Impossible de lire les textes dans le noir ! Alors, suivant l’injonction silencieuse cousue en filigrane, on s’abandonne très vite aux échos, aux sensations, histoire de se laisser emporter par la structure du récit, comme Alice, de l’autre côté du miroir. On tente de percevoir les messages, d’en deviner les coutures.

Comme dans une dramaturgie théâtrale, une performance artistique, l’expérience est polyphonique et multisensorielle. D’une collection à l’autre, les lignes, comme les matières, se coulent dans le vocabulaire de la technologie, du design, avec des modèles qui se démontent ou bien clignotent, empruntent à la nature immémoriale des éléments, l’air, le métal, le végétal… Le parcours achevé, l’âme et le dessein du créateur se profilent. Morceau par morceau, Hussein Chalayan semble dessiner la cartographie d’un monde sombre, mouvant, fragmenté, en pleine gestation. Le nôtre.

Repéré à sa sortie du Central St Martins College de Londres en 1993, Chalayan devient, avec Alexander McQueen, l’autre phénomène de la scène britannique. Le jeune Turc chypriote, né à Nicosie en 1970, éblouit et laisse la mode sans voix. Il est ailleurs. Avec Between, en 1997, dénonçant la dépersonnification par le code religieux, il mélange tchador et nudité. L’hiver 2000, la surréaliste performance Afterwords évoque, à partir de « meubles-à-porter », le tragique statut des réfugiés… De ses aboutissements vestimentaires, néanmoins parfaitement portables, émane l’ambivalente poésie d’une enfance au soleil marquée de déchirures. De podiums en galeries, le créateur mêle ses questionnements à son tissu créatif : l’identité, la question religieuse, l’exil, le regard d’autrui, l’impermanence. Fruit des tensions, des contradictions, des mutations de son époque, il sait en capter les contrastes, les formes, les lignes de force. Pont entre deux mondes, aux frontières de plusieurs univers, il incarne et projette avec grâce les paradoxes d’une humanité qui sait habiller de lumière ses propres limites.

« Hussein Chalayan, récits de mode », jusqu’au 21 nov., mar. au dim. 11h-18h, jeu. jusqu’à 21h, musée des Arts décoratifs, 107, rue de Rivoli, 1er, 01-44-55-57-50. (7,50-9 €). « Hussein Chalayan », éd. Rizzoli NY, 65 €.

Visite de l’exposition d’Hussein Chalayan en compagnie de Peggy Housset

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