L’Allemagne célèbre ses ‘travailleurs invités’ turcs 4 novembre 2011
Posted by Acturca in Economy / Economie, Immigration, Turkey / Turquie.Tags: Allemagne, Gastarbeiter, Turkey / Turquie
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Le Monde (France) vendredi 4 novembre 2011, p. 6
Frédéric Lemaître, Berlin Correspondant
Recep Tayyip Erdogan, invité à Berlin, a durement critiqué la politique d’intégration allemande
Friands d’anniversaires, les Allemands ne pouvaient pas laisser passer celui-là : les cinquante ans de l’accord conclu avec la Turquie pour accueillir des Gastarbeiter (« travailleurs invités »), selon la terminologie officielle. C’était le 31 octobre 1961. Les immigrés devaient à l’origine rester seulement deux ans et être remplacés par de nouveaux arrivants. A la demande des employeurs, les Turcs furent invités à rester.
Environ 750 000 d’entre eux furent recrutés de 1961 à 1973, date de la fin de l’accord. Depuis, environ la moitié sont repartis. Les autres sont restés, rejoints par leur famille. Aujourd’hui près de 3 millions de personnes vivant en Allemagne ont des origines turques.
Invité à célébrer cet anniversaire, mercredi 2 novembre, le premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, s’est montré à peine plus diplomate que lors de ses précédentes visites. Devant Angela Merkel et dans la presse, il a multiplié les critiques à l’égard de l’Allemagne.
Il a notamment reproché à la chancelière de ne pas vouloir de la Turquie dans l’Union européenne (UE), de refuser la double nationalité aux ressortissants turcs, et de faire de la connaissance de la langue allemande un préalable important à l’intégration, ce qui, d’après lui, constitue « une atteinte aux droits de l’homme ».
Mme Merkel s’est défendue point par point et n’a rien concédé sur l’adhésion à l’UE à laquelle l’Allemagne, comme la France, reste hostile. Alors que M. Erdogan s’adresse souvent aux Turcs vivant en Allemagne, désormais autorisés à voter en Turquie, la chancelière a déclaré à leur intention : « Je suis la chancelière de tous, je suis aussi votre chancelière. » Mme Merkel a évoqué « de nombreux exemples d’intégration réussie ». Mais « ce n’est pas encore assez et il y a aussi des problèmes », a-t-elle reconnu, citant notamment l’enseignement.
« Success story allemande »
Paradoxalement, cette rencontre assez froide entre les deux dirigeants est intervenue alors que le débat sur l’intégration est en grande partie apaisé. Il y a un an, un essai rédigé par un membre du SPD (le Parti social-démocrate), Thilo Sarrazin (Deutschland schafft sich ab : « l’Allemagne court à sa perte ») avait provoqué un immense débat. Dans ce livre très médiatisé et vite devenu un best-seller, l’auteur jugeait que l’Allemagne allait être dominée par les musulmans, plus pauvres et donc moins intelligents, et qu’elle allait ainsi péricliter.
Ces dernières semaines, à de rares exceptions près, la presse est unanime à remercier les Gastarbeiter sans lesquels l’Allemagne ne serait pas la puissance économique qu’elle est devenue. « L’immigration des Turcs est une success story allemande », juge même Guido Westerwelle, ministre des affaires étrangères. Le pays affronte désormais un autre phénomène : alors qu’auparavant les Turcs qui rentraient « au pays » étaient âgés, de jeunes Allemands qualifiés d’origine turque, déplorant l’ostracisme dont ils sont victimes en Allemagne, émigrent en Turquie où ils constituent une élite économique.
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