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La religion entre en force dans les écoles publiques turques 27 avril 2012

Posted by Acturca in Religion, Turkey / Turquie.
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La Croix (France) no. 39263, vendredi 27 avril 2012, p. 5

Delphine Nerbollier, Istanbul de notre correspondante

Une nouvelle loi introduit des cours facultatifs sur le Coran et l’enseignement de l’arabe. Les milieux laïcs s’inquiètent et craignent que la pression sociale pousse à rendre ces enseignements obligatoires.

Le débat sur la place de la religion dans la société turque ne cesse de prendre de l’ampleur. Au début de la semaine, le pianiste Fazil Say, de renommée mondiale, a annoncé qu’il quittait la Turquie pour s’installer au Japon. Connu pour ses positions laïques, Fazil Say avait récemment déclaré son athéisme sur le réseau social Twitter et ironisé sur l’islam, ouvrant la voie à des poursuites judiciaires. « Je suis peut-être la première personne au monde à faire l’objet d’une enquête en justice pour avoir déclaré mon athéisme », a-t-il déclaré au journal Hürriyet; « Si je suis condamné à la prison, ma carrière sera terminée. »

Cette affaire intervient dans un contexte déjà tendu après le passage en force, fin mars, d’une réforme du système éducatif, conspuée par les milieux laïcs. La nouvelle loi transforme de fond en comble l’actuel système en faisant passer de 8 à 12 années la durée d’enseignement obligatoire. Au-delà de cet objectif loué par la majorité des députés, c’est le découpage de ce cursus en trois périodes de quatre années – proche des écoles primaires, collèges et lycées français – qui crée la polémique. Désormais, les élèves pourront accéder dès la fin du primaire, et non plus au stade de lycée, aux fameux imam hatip ou écoles de prédicateurs religieux initialement vouées à former des imams.

Ces écoles, perçues comme fers de lance d’une éducation religieuse loin des standards laïcs de la Turquie, avaient vu leur fonctionnement remanié après le coup d’État dit « postmoderne » du 28 février 1997. À l’époque, le gouvernement de coalition mené par un islamiste avait été contraint à la démission par les militaires. Alors que la justice vient de lancer une enquête contre des militaires impliqués dans ce « putsch », le premier ministre Recep Tayyip Erdogan, diplômé d’un imam hatip, a reconnu que cette réforme de l’éducation est un moyen de « panser les plaies du 28 février ». En janvier, il avait aussi annoncé la fin des cours obligatoires de « sécurité nationale » dispensés par des militaires.

La réforme ne s’arrête pas là. Elle introduit deux cours facultatifs sur le Coran et sur la vie du prophète Mohammed ainsi que l’apprentissage de la langue arabe, en collège et lycée, qui s’ajoutent au cours obligatoire de religion d’une heure par semaine. « Qu’y a-t-il de plus beau qu’apprendre le Coran ? » a demandé Recep Tayyip Erdogan lors des débats parlementaires. « Aujourd’hui, grâce à notre gouvernement, la nation obtient le droit d’apprendre sa religion. »

Si les supporteurs de cette loi mettent en avant la plus grande diversité de l’enseignement, l’opposition kémaliste y voit une atteint directe à la tradition laïque du pays. Au-delà de la question des imam hatip, se pose celle de l’aspect réellement facultatif qu’auront les nouveaux cours de religion notamment en Anatolie où la pression sociale est forte. Par ailleurs, cette réforme est perçue comme une mise en application directe de la volonté du premier ministre de « former une jeunesse religieuse » comme il en avait évoqué le souhait en février. À l’époque, il avait aussi reproché à l’opposition de vouloir « former une génération d’athées ».

Il y a encore cinq ans, cette loi aurait certainement été retoquée par la Cour constitutionnelle connue pour ses positions rigides sur la laïcité. Ce scénario semble aujourd’hui peu probable, compte tenu de sa nouvelle composition et les récentes victoires du gouvernement sur la hiérarchie militaire, qui s’était jusqu’alors autoproclamée garante de la laïcité.

À la polémique sur le fond, s’ajoutent aussi sur les critiques sur la forme, le ministère de l’éducation et les enseignants ayant été mis devant le fait accompli. Il n’en fallait pas moins pour déclencher un tir groupé de critiques dans un pays où l’école est depuis la fondation de la République en 1923 le terrain d’affrontement privilégié entre laïcs et religieux.

 

Un ancien ministre en prison

L’ancien ministre turc de l’intérieur Mehmet Agar s’est rendu mercredi aux autorités de la prison de Yenipazar (province d’Aydin), pour purger une peine de cinq ans de prison, liée à son implication dans l’affaire de Susurluk, un scandale politico-mafieux qui avait ébranlé la Turquie il y a quinze ans. Il doit y être incarcéré, après avoir fait l’objet d’un mandat d’arrêt donnant suite à la confirmation de sa condamnation par la Cour de cassation, a rapporté l’agence de presse Anatolie. Ancien chef de la police turque et du Parti de la juste voie (DYP), il a été condamné en septembre 2011, au terme d’une interminable procédure judiciaire, par un tribunal d’Ankara, en tant que « chef d’une organisation criminelle ».

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