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Ces Kurdes irakiens qui rêvent d’Istanbul 20 décembre 2012

Posted by Acturca in Economy / Economie, Istanbul, Middle East / Moyen Orient, Turkey / Turquie.
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Courrier international (France) no.1155, 20 décembre 2012, p.31         Türkçe

Sahin Alpay, Zaman (Istanbul)

Le « Family Mall » est le plus grand centre commercial d’Erbil. Il symbolise parfaitement l’augmentation du pouvoir d’achat des Kurdes d’Irak. En effet, le revenu par tête d’habitant, qui, au Kurdistan d’Irak, était il y a dix ans de 300 dollars, a, selon les statistiques officielles locales, dépassé les 4 500 dollars et j’ai même rencontré des gens qui évoquaient le chiffre de 6 500 dollars. La plupart des magasins de ce centre commercial appartiennent à des personnes venues de Turquie, illustrant ainsi le rôle croissant des entreprises turques qui débarquent dans la région et participent au développement du Kurdistan. Le rapprochement s’effectue aussi dans les esprits entre la Turquie et le Kurdistan irakien.On se trouve dans une situation paradoxale. En effet, alors que les relations entre Ankara et le Kurdistan de Turquie ne cessent de se détériorer, les liens avec les Kurdes d’Irak se renforcent. Il n’est un secret pour personne qu’Ankara ne s’est pas bien comporté vis-à-vis de ses propres Kurdes. Le soulèvement mené par le PKK [le mouvement armé kurde] continue. Pourquoi, dans ces conditions, les Kurdes d’Irak, du moins la plupart d’entre eux, se sentent-ils de plus en plus proches de la Turquie ?La meilleure réponse à cette question m’a été faite par un professeur en psychologie de l’université de Souleymanieh [grande ville du Kurdistan irakien]. « C’est en réalité un phénomène nouveau. Une tendance qui s’est développée après l’arrivée d’Erdogan au pouvoir en Turquie. Je vous donne un exemple qui me concerne personnellement. Avant 2002, chaque fois que je me rendais en Turquie, je subissais les vexations systématiques des policiers turcs dès que ceux-ci voyaient l’inscription Kurdistan sur mon passeport. Mais, maintenant, la situation a complètement changé. Je suis désormais respecté et j’en suis heureux. Istanbul est notre porte d’ouverture vers l’Ouest… » De même qu’Erbil et Souleymanieh incarnent pour les Arabes irakiens l’endroit où ils peuvent souffler et fuir la chaleur étouffante des régions plus méridionales de l’Irak – ce qui explique notamment que les hôtels y poussent comme des champignons -, Istanbul est devenue pour de nombreux Kurdes irakiens un lieu où ils se sentent à l’aise et où ils peuvent nouer toutes sortes de contacts. N’oublions pas qu’Istanbul est la plus grande ville kurde du monde – plus grande encore de ce point de vue qu’Erbil, Souleymanieh ou Diyarbakir [grande ville à majorité kurde du sud-est de la Turquie].Maliki sur le départ. Aujourd’hui, la moitié de la population du Kurdistan d’Irak, autonome depuis 1991, a moins de vingt ans et ne se sent donc plus très irakienne. Cette situation est un legs de la dictature de Saddam Hussein, qui a opprimé les Kurdes et dilapidé les richesses du pays. Au fur et à mesure que le Premier ministre chiite irakien, Nouri Al-Maliki, manifeste son envie de reprendre le contrôle de la région kurde, c’est à dire au fur et à mesure qu’il se « saddamise » comme on le dit de plus en plus, les rapports entre Erbil et Bagdad se distendent. La mise sur pied par Maliki d’une brigade militaire baptisée « Commandement de l’opération du Tigre » [et créée dans le contexte de la rivalité entre Kurdes et Arabes par rapport à la ville de Kirkouk ] est la dernière illustration de la tension de plus en plus palpable dans les relations entre Kurdes et Arabes irakiens. C’est paradoxal, il y a encore quelques années, la Turquie se tenait aux côtés du gouvernement central irakien, gardant ses distances vis-à-vis d’Erbil, pour marquer son attachement au maintien de l’intégrité territoriale de l’Irak (et, par conséquent, de la Turquie). La situation s’est aujourd’hui totalement inversée pour des raisons économiques, politiques et culturelles de plus en plus évidentes. Comme me l’a dit un observateur avisé de la région, « la Turquie ne peut plus privilégier Bagdad au détriment du Kurdistan irakien. En effet, tant [le président syrien] Assad que Maliki sont sur le départ . »

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