Islamophobie. À l’abri des stéréotypes

Le Télégramme (Bretagne) jeudi 10 janvier 2013, p. QPR5
Finistère-sud : Quimper

Sylvain Faliz

Une cinquantaine de personnes ont participé au débat organisé par la Cimade, hier soir à la MPT de Penhars. Sur le thème de l’islamophobie, les échanges, francs et décomplexés, ont duré 2h30. Bien loin des clichés habituels.

Si certains croient que le meilleur moyen de combattre l’islamophobie est de ne pas en parler, une cinquantaine de personnes qui pensaient tout le contraire se sont réunies, mardi soir à la MPT de Penhars. «L’islamophobie, ce n’est pas critiquer la religion musulmane, c’est discriminer un musulman», commence par définir Tahar Mamouni, du comité contre l’islamophobie. Son association estime la hausse de ce type d’actes à près de 50% en 2011.

Les causes de l’islamophobie

Mehmet Yilmaz, président de l’association culturelle turque, évoque alors les croix gammées taggées sur les murs de la mosquée de Penhars en septembre 2006 et en décembre dernier. Il avoue même que c’est l’islamophobie qui l’a poussé à éviter tout «signe ostentatoire» indiquant le lieu de culte de son association. Mais le débat voulu par la Cimade et sa présidente finistérienne, Pauline Gomez, ne démarre vraiment qu’avec l’intervention d’une jeune musulmane. «Je porte le voile depuis mes 18 ans. Il y a peu, un homme m’a dit de retourner dans mon pays. J’ai répondu… que je suis Française». «Certains musulmans, comme les Algériens des savonneries de Marseille, sont là depuis cinq générations. Pourtant, ils ne sont pas toujours considérés comme de vrais Français. En dirait-on autant à un Polonais fervent catholique?», interroge un membre de la Cimade. Mehmet Yilmaz se veut soudain plus alarmiste : «Avant la Seconde Guerre mondiale, il y avait la crise et une catégorie de personnes était fustigée par les autres, deux phénomènes que l’on retrouve aujourd’hui!». Un animateur de quartier évoque alors le cercle vicieux selon lequel «les victimes d’exclusion, lors d’un entretien d’embauche ou autre, se regroupent et risquent, à terme, de commettre des actes aggravant la mauvaise image des musulmans». Il tient à rappeler qu’un bon musulman doit aider son prochain, et ce même s’il fait figure de tête de turc au coeur d’un «repli identitaire français causé par la crise».

Qu’est-ce que la laïcité?

«Je me souviens d’avoir été désolée face à deux petites filles turques qui ne pouvaient pas se mettre en maillot de bain à la piscine», raconte ensuite une enseignante retraitée. «Un océan de convergences pour quelques misérables divergences qui éloignent les Musulmans du reste des Français», lui répond Mehmet Yilmaz. Un autre retraité affirme alors que la pratique de la religion doit rester dans la sphère privée et qu’il faut faire preuve de retenue dans la sphère publique. Une vision à nouveau recadrée par le président de l’association culturelle turque : «La laïcité est la garantie par l’État que chacun peut exercer sa religion, et non pas la volonté de faire disparaître tous les signes d’appartenance à une religion». Il suffirait donc à chacun de respecter les conditions du «vivre ensemble». Et pour combattre la peur de l’Islam, rien de mieux que de faire sa connaissance. À ce titre, une proposition est tombée à pic au milieu des débats : «Je suis catholique et nous organisons deux réunions de présentations de l’islam les 8 et 22 février prochain à la maison des associations de Quimper».