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Place Taksim, un Tahrir turc 3 juin 2013

Posted by Acturca in Istanbul, Middle East / Moyen Orient, Turkey / Turquie.
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Sud Ouest (France) Lundi 3 juin 2013, p. 4

Christophe Lucet

Recep Tayyip Erdogan n’a rien vu venir. Le Premier ministre turc doit se demander comment la protestation contre l’aménagement d’une place et d’un parc dans le centre d’Istanbul a pu déboucher en trois jours sur une vague contestatrice sans précédent contre son pouvoir. C’est pourtant ce qui s’est passé.

Serait-ce l’écho du printemps arabe ? Voilà en effet le dirigeant surpuissant d’un pays clé de l’Orient accusé de dérive autoritaire par une partie de son peuple qui, pour le clamer à la face du monde, s’empare d’un lieu symbolique, au coeur de la capitale. Taksim rimant avec Tahrir, le parallèle avec la révolution égyptienne de 2011 contre Hosni Moubarak est tentant. Mais méfions-nous des raccourcis.

Erdogan, grisé par ses succès, oublie d’écouter l’opposition quand elle dénonce son autoritarisme…

Élu démocratiquement à trois reprises, dont la dernière en 2011 largement, l’islamo-conservateur Erdogan est un dirigeant légitime. En dix ans de pouvoir, son parti, l’AKP, a accompagné un essor sans précédent de l’économie turque et le triplement du revenu par tête. D’où vient alors que, si vite, certains rêvent de voir ce  » nouveau sultan  » dégager comme un vulgaire tyran arabe ? La réponse réside dans l’histoire du pays et dans la psychologie du chef.

Depuis l’élection d’Erdogan, la Turquie a renoué avec une identité musulmane bridée par la révolution laïque de Kemal Atatürk puis par une série de coups d’État militaires. Mais le fond laïque du pays n’a pas disparu et se réveille à mesure que l’AKP et son patron usent et abusent de leur pouvoir.

La mise au pas des généraux était souhaitée, mais par forcément celle des magistrats, de la presse ou des syndicats. Au nom de l’ordre et de la lutte antiterroriste, les effectifs policiers ont triplé et des opposants de tous bords ont été envoyés en prison. Au nom de l’islam, on a rétabli le voile dans l’espace public, passé une loi limitant la vente d’alcool et embastillé des intellectuels pour  » blasphème  » contre Mahomet. Tout cela fait boule de neige, mais le chef, sûr d’agir au nom du peuple et grisé par le succès, oublie d’écouter l’opposition quand elle dénonce ses projets pharaoniques. Il n’entend pas non plus ceux qui lui reprochent de n’avoir pas su garder son pays à l’écart de la guerre syrienne.

Après trois mandats, Erdogan vise la première présidentielle au suffrage universel, en 2014. Mais la place Taksim est en train de poser des limites à ses ambitions.

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