Ankara n’exportera plus son modèle 18 juillet 2013
Posted by Acturca in Middle East / Moyen Orient, Turkey / Turquie.Tags: AKP, coup d'État, Egypte, Frères musulmans, Kadri Gürsel, Mohamed Morsi
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Courrier International (France) 18 juillet 2013, p. 13 English Türkçe
Kadri Gursel, Al-Monitor (Washington)
Les références à un islam modéré pour diriger des sociétés complexes ont échoué aussi bien en Turquie qu’en Egypte.
De deux choses l’une, soit les islamistes actuellement au pouvoir en Turquie sont d’avis que le coup d’Etat contre le président Morsi en Egypte était également dirigé contre eux, soit c’est l’impression qu’ils s’efforcent par tous les moyens de donner aux observateurs extérieurs. Mais qu’importe de le savoir puisque tout est affaire de perception. En l’occurrence, les deux scénarios produisent les mêmes résultats.
Il est certain que les dirigeants de l’AKP [le parti islamiste au pouvoir] et les islamistes du mouvement Gülen [Fethullah Gülen est un penseur et homme d’affaires islamiste turc] ont voulu profiter de la victimisation des Frères musulmans en Egypte. Les islamistes turcs ont grandement besoin de se poser en victimes en ce moment.
Leur première réaction face à l’explosion sociale du parc Gezi [en juin] – qu’ils ont eux-mêmes provoquée par les violences policières – a été de faire croire qu’il s’agissait d’un complot international contre le pouvoir de l’AKP. Ils ont tenté de se faire passer pour des victimes afin de discréditer les manifestants. Nul doute que cela permettait à ces prétendues victimes d’éviter tout débat avec ceux qui voulaient parler des errements de leur gouvernement.
“Nouvel ordre”. Le coup d’Etat en Egypte a sévèrement touché le gouvernement islamiste turc. Morsi et les Frères musulmans étaient politiquement et économiquement des partenaires stratégiques de l’AKP. En transférant le processus électoral et leur expérience démocratique d’“islamistes modérés” à l’Egypte et aux Frères musulmans – un important courant allié –, les dirigeants de l’AKP avaient l’occasion de renforcer leur propre pouvoir.
Leur influence ne s’arrêtait pas là. Dans le cadre d’un accord conclu en octobre 2012, la Turquie avait offert un prêt de 1 milliard de dollars sur cinq ans, dont le remboursement ne commencerait que la quatrième année. L’attribution de ce prêt au moment même où l’Egypte se débattait pour obtenir 4,8 milliards de dollars auprès du Fonds monétaire international montre bien l’importance de l’Egypte pour la Turquie.
L’Egypte des Frères musulmans devait jouer un rôle clé dans l’établissement du “nouvel ordre” que le ministre turc des Affaires étrangères, Ahmet Davutoglu, avait l’intention d’installer au Moyen-Orient. A cet égard, le coup d’Etat égyptien a véritablement eu l’effet d’une bombe pour le gouvernement de l’AKP. Le Premier ministre, Tayyip Erdogan, a interrompu ses vacances et est immédiatement retourné à Istanbul afin d’évaluer avec ses ministres la gravité de la situation.
Lors de sa tournée de septembre 2011 dans des pays arabes comme l’Egypte, la Libye et la Tunisie, Erdogan avait pourtant prôné le sécularisme à chacune de ses étapes. Personne n’avait écouté ses judicieux conseils à propos de l’Egypte, et lui-même n’a pas suivi ses recommandations dans son propre pays.
S’il avait défendu le sécularisme en Turquie, il n’y aurait jamais eu de manifestations à Gezi. Voilà en résumé ce qui s’est passé en Egypte et en Turquie : les références islamistes de l’AKP et des Frères musulmans ne leur ont pas suffi à gouverner des sociétés profondément diverses et complexes. Ils auraient dû faire appel à des références extérieures à leur culture politique telles que le pluralisme et la participation.
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