La Turquie espérait rebondir grâce aux Jeux 10 septembre 2013
Posted by Acturca in Economy / Economie, Istanbul, Turkey / Turquie.Tags: Jeux olympiques d'été de 2020
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Le Monde (France) mardi 10 septembre 2013, p. SCQ4
Économie et Entreprise
Claire Guélaud
La Turquie ne bénéficiera pas de l’élan qu’aurait pu lui donner l’organisation des Jeux olympiques d’été de 2020 à Istanbul. Le Comité international olympique (CIO) a préféré, samedi 7 septembre, à cette candidature – la cinquième pour la Turquie -, celle de Tokyo. Ce n’est pas une bonne nouvelle pour le pays qui traverse une période très délicate, sur fond de dépréciation de la livre et de ralentissement de sa croissance.
La Turquie, qui ambitionnait d’être le premier pays majoritairement musulman à accueillir les Jeux, s’était engagée à investir plus de 19 milliards de dollars dans l’amélioration de ses infrastructures et la rénovation urbaine. Les constructions d’un nouveau pont et d’un nouvel aéroport à Istanbul restent toutefois à l’ordre du jour.
Ralentissement en cours
Depuis que la Fed, la banque centrale américaine, a annoncé en mai son intention de resserrer sa politique monétaire, la monnaie turque s’est dépréciée comme celle d’autres pays émergents. La livre a perdu environ 20 % par rapport au dollar malgré l’intervention de la banque centrale, qui a injecté 8 milliards de dollars sur les marchés et relevé ses taux directeurs. La Bourse a chuté de près de 30 % au cours des trois derniers mois. Et rien ne permet d’espérer un retournement rapide de la situation. Car le ministre de l’économie, Zafer Caglayan, a annoncé jeudi 5 septembre qu’Ankara allait réviser à la baisse sa prévision de croissance pour 2013. Elle devrait être ramenée de 4 % à autour de 3 %. D’autres indicateurs, y compris l’inflation, prévue à 6,2 % en fin d’année, seront revus, a précisé le ministre.
Jusqu’au printemps dernier, le pays s’était plutôt signalé par sa capacité à rebondir rapidement après la récession de 2008-2009. « La Turquie a beaucoup souffert de la crise mondiale, mais moins longtemps que le reste de la zone OCDE, et son redressement a été beaucoup plus marqué. La demande intérieure est rapidement repartie à la hausse, et la croissance a atteint 9,2 % en 2010 et 8,5 % en 2011 », notait l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) dans une étude qu’elle lui avait consacrée en juillet 2012. « Pendant la crise, les entreprises privées ont continué à développer leurs activités et à aller chercher des marchés en Afrique et en Asie. Elles ont beaucoup exporté hors d’Europe. Ce dynamisme entrepreneurial est un des points forts de l’économie turque », analyse Rauf Gönenç, de l’OCDE. Dans le même temps, le secteur bancaire, qui avait failli sombrer au début des années 2000, s’est assaini. La Turquie a donc abordé les turbulences financières de 2008 avec des banques solides.
Ces atouts ne suffisent pas à compenser les faiblesses structurelles du pays qui, observe Céline Antonin, de l’OFCE, « vit à crédit ». « L’inflation a longtemps été à deux chiffres. L’épargne intérieure est faible. Il y a beaucoup d’investissements de portefeuilles à court terme et le risque de fuite de capitaux est élevé. La compétitivité a reculé et l’industrie turque peine à monter en gamme. »
Face à l’explosion du déficit extérieur et au boom du crédit, qui progressait de 25 % à 30 % l’an, Ankara a dû infléchir sa politique pour éviter la surchauffe. La croissance s’en est ressentie dans un pays où il faudrait qu’elle atteigne 6 % pour permettre à la population en âge de travailler de trouver un emploi.
Le déficit extérieur demeurant très élevé (de l’ordre de 6 % du PIB), la dette extérieure – pour moitié de court terme – devant être régulièrement refinancée, la Turquie est particulièrement vulnérable quand les choses se gâtent. C’est le cas aujourd’hui du fait du retournement attendu de la politique monétaire américaine, de la crise syrienne, des tensions politico-sociales du mois de juin à Istanbul. Les entrées de capitaux à court terme jouant un rôle essentiel dans le financement extérieur, l’économie, insistait l’OCDE en 2012, reste « vulnérable aux changements d’humeur des investisseurs et à la volatilité des marchés financiers ». Cette vulnérabilité en fait aujourd’hui un des pays émergents les plus exposés.
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