Un volet iranien dans l’enquête qui secoue le pouvoir turc 21 décembre 2013
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Le Monde (France) samedi 21 décembre 2013, p. 4
Guillaume Perrier, Istanbul Correspondance
Un homme d’affaires irano-azéri aurait réalisé des transferts de fonds entre la Turquie et l’Iran.
Un homme d’affaires irano- azéri de 29 ans, marié à une chanteuse de variété turque, est au centre du scandale politique qui ébranle le pouvoir turc depuis mardi 17 décembre. Un scandale qui a désormais des ramifications iraniennes. Reza Zarrab est l’un des suspects dans l’affaire présumée de corruption, de malversations et de blanchiment qui éclabousse l’entourage du premier ministre Recep Tayyip Erdogan et son parti, l’AKP.
L’affaire Zarrab est l’un des trois volets de l’enquête, qui a donné lieu à une cinquantaine d’arrestations, a déclaré jeudi le parquet d’Istanbul. La justice enquêtait depuis un an sur cet homme, soupçonné d’avoir réalisé des transferts de fonds entre la Turquie et l’Iran, malgré les sanctions visant Téhéran. Les activités en Turquie de M. Zarrab ont connu une spectaculaire envolée ces deux dernières années. En 2011, il a établi une compagnie d’import-export d’or et de pierres précieuses, Safir. Dès sa première année, la société réalise à elle seule, 46 % des exportations turques d’or. Des proches de M. Zarrab ont été interceptés début 2013 à l’aéroport d’Istanbul avec 30 millions de dollars (22 millions d’euros) en liquide et 320 lingots d’or alors qu’ils s’apprêtaient à embarquer pour Dubaï. L’homme d’affaires est soupçonné d’avoir transféré 60 milliards de dollars vers l’Iran, en infraction avec l’embargo financier décrété par l’Union européenne et les Etats-Unis, et d’avoir reçu des fonds de la banque centrale iranienne.
« Or contre gaz »
Depuis que des sanctions ont été imposées à l’Iran, ce commerce est florissant. « Les opérations financières ont été bloquées. A partir de mars 2012, les échanges d’argent avec l’Iran, grâce au système de transfert international de devises, Swift, ne sont plus autorisés. Pourtant, l’Iran a pu continuer à recevoir des devises et à régler ses factures » , souligne Ugur Gürses, chroniqueur économique au quotidien Radikal. La Turquie a servi de plate-forme de paiement et l’or de monnaie d’échange, notamment pour la vente de gaz et de pétrole iranien.
Ankara a exporté en 2012 plus de 12 milliards de dollars (8,7 milliards d’euros) d’or vers l’Iran et les Emirats arabes unis où le métal était converti en devises. Soit une augmentation de 1 200 % en un an. Dans ce montage baptisé « or contre gaz » , le métal précieux, servait principalement à régler les notes énergétiques. La Turquie est le premier importateur de gaz iranien. La banque turque Halkbank, à majorité publique mais dont plusieurs sociétés américaines détiennent des parts, aurait servi d’interface : Téhéran était payée en lires turques, changées ensuite contre de l’or.
Pointée du doigt par un groupe de sénateurs américains, la banque turque avait démenti, en avril, tout rôle dans ces transactions. Le PDG de Halkbank, Süleyman Aslan a été arrêté mardi et la police a retrouvé à son domicile, 4,5 millions de dollars en liquide cachés dans des boîtes à chaussures. Dans cette affaire, trois ministres sont également soupçonnés d’avoir reçu des pots-de-vin, plusieurs dizaines de millions d’euros, pour avoir facilité ce commerce et pour avoir octroyé gracieusement la nationalité turque à M. Zarrab. Déjà en 2010, les câbles diplomatiques révélés par WikiLeaks avaient fait état de relations commerciales étroites entre l’entourage de M. Erdogan et l’industrie du gaz en Iran.
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