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Une loi Internet « liberticide » en Turquie 8 février 2014

Posted by Acturca in Turkey / Turquie.
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Le Figaro (France) no. 21620, samedi 8 février 2014, p. 6

Laure Marchand, Istanbul

L’opposition dénonce une nouvelle atteinte à la liberté d’expression de la part du pouvoir d’Erdogan. « Big brother » a les Turcs à l’œil. Le gouvernement islamo-conservateur a toujours eu Internet dans le collimateur mais de là à placer sous surveillance tous ses utilisateurs, il y a un pas… qui a été franchi. En dépit des inquiétudes des organisations des droits de l’homme, des partis de l’opposition à l’unisson ou de l’Union européenne, qui la jugent liberticide, une loi contrôlant strictement le Web a été votée par les députés turcs.

Adopté mercredi, le texte donne à l’Autorité de régulation des télécommunications (TIB) compétence pour bloquer un site dès lors qu’il porte atteinte « à la vie privée » ou est « insultant ou discriminatoire » . L’appréciation est laissée à l’entière discrétion de l’instance administrative, sans passer par une décision de justice. Autre disposition qui alarme les défenseurs de la liberté d’expression, les fournisseurs d’accès auront obligation de conserver pendant deux ans les données des internautes et de les fournir aux autorités si ces dernières en font la demande. Là encore, un juge n’aura pas besoin de donner son feu vert.

Cette loi « ne vise qu’à renforcer la cybercensure, le contrôle gouvernemental d’Internet et la surveillance des citoyens » , s’alarme Reporters sans frontières. D’autant que, selon la Chambre des ingénieurs informatiques, le directeur de la TIB est nommé par les services de renseignements turcs, eux-mêmes sous l’autorité du premier ministre.

Réseaux sociaux en accusation

Bruxelles s’inquiète également de restrictions qui ne sont pas compatibles avec les standards démocratiques européens et demande au pays candidat la révision du texte. Pour Stefan Füle, commissaire à l’Élargissement, « le public a besoin de plus de transparence et d’informations, pas de restrictions » . De son côté, le Parti républicain du peuple, la principale formation de l’opposition, dénonce « des interdictions qui existent pendant la période des coups d’État » , en référence aux putschs militaires passés. Le dernier recours est désormais le président de la République, Abdullah Gül, qui peut opposer son veto à la loi.

Alors que le gouvernement se débat face à un gigantesque scandale politico-financier, cette loi est perçue par ses détracteurs comme la manifestation de sa volonté d’empêcher toute information critique. Déjà au mois de juin, lors de la révolte de Gezi dénonçant ses dérives autoritaires, le premier ministre, Recep Tayyip Erdogan, s’en était pris aux utilisateurs des réseaux sociaux qu’il avait qualifiés de « fauteurs de trouble » . La Turquie possède un arsenal législatif très coercitif concernant Internet. YouTube avait même été interdit entre 2008 et 2010 à cause d’une vidéo jugée insultante pour Mustafa Kemal, le fondateur de la République, et qui avait été postée par des Grecs. Selon le site engelliweb.com, 40 000 sites sont déjà interdits par la justice, notamment ceux ayant un rapport avec les Kurdes ou l’homosexualité. Et l’augmentation de la censure est préoccupante dans un pays qui est le premier geôlier de journalistes dans le monde : les demandes de retrait de pages de Google par le gouvernement ont bondi de près de 1 000 % les six premiers mois de 2013.

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