M. Poutine abandonne le gazoduc « South Stream » 3 décembre 2014
Posted by Acturca in Economy / Economie, Energy / Energie, Russia / Russie, South East Europe / Europe du Sud-Est, Turkey / Turquie.Tags: centrale nucléaire, diplomatie, gazoduc, Recep Tayyip Erdogan, South Stream, Tatars, Vladimir Poutine
trackback
Le Monde (France) mercredi 3 décembre 2014, p. 6
Marie Jégo
En visite à Ankara, le président russe veut renforcer la coopération énergétique avec la Turquie.
Bien que sa visite à Ankara, lundi 1er décembre, n’ait duré que quelques heures, le président Vladimir Poutine, standing oblige, avait fait venir de Russie sa limousine blindée pour aller de l’aéroport au nouveau palais de son -homologue turc, Recep Tayyip -Erdogan, qu’il était le second chef d’Etat à visiter, après le pape François. Rebaptisée » visite d’Etat » à la dernière minute – au départ il s’agissait d’une simple » visite de travail » -, la rencontre entre le tsar Vladimir et le sultan Tayyip ouvre une nouvelle ère de coopération en matière énergétique, rejetant au second plan les sérieuses divergences de vue entre les deux hommes, notamment sur la Syrie.
L’énergie est le moteur de la nouvelle lune de miel russo-turque. M. Poutine a annoncé l’abandon du projet de construction du gazoduc South Stream prévu pour approvisionner l’Europe méridionale et orientale en gaz russe tout en contournant l’Ukraine. Il en a rejeté la responsabilité sur Bruxelles et sa politique de sanctions contre la Russie. » Puisque l’Union européenne a adopté une position négative, empêchant le projet – South stream – d’aboutir, nous allons trouver d’autres clients. Il s’agit de la décision de nos amis européens « , a ironisé Vladimir Poutine lors de la conférence de presse commune.
Le numéro un russe a indiqué qu’un gazoduc de substitution allait voir le jour. Ce tube viendra doubler le Blue stream, qui achemine déjà le gaz russe vers les foyers turcs en passant sous la mer Noire. Un système de distribution de gaz sera construit à la frontière gréco-turque. Le marché turc est, pour Gazprom, le débouché le plus important après l’Allemagne.
Dépendante à 50 % du gaz russe, la Turquie veut s’en affranchir en construisant 80 centrales thermiques (dont une vingtaine au charbon) et trois centrales nucléaires. Le géant russe Rosatom a emporté l’appel d’offres pour construire la première, celle d’Akkuyu, dans la région de Mersin, au sud. Ce contrat d’une valeur de 20 milliards de dollars (16 milliards d’euros) inquiète les écologistes turcs, qui rappellent que la zone est sismique. A la veille de l’arrivée du président russe à Ankara, le ministère turc de l’environnement a avalisé le démarrage du chantier.
Le meilleur carburant pour la relation russo-turque reste incontestablement la fibre anti-occidentale. Alors que M. Erdogan ne perd pas une occasion de souligner l’impéritie des alliés européens et américains sur le dossier syrien, M. Poutine a profité de son séjour à Ankara pour fustiger l’ingratitude des Occidentaux, responsables des » sanctions illégitimes » qui frappent son pays, puni pour l’annexion de la Crimée et l’agression militaire dans l’Est ukrainien.
Tout miel, le maître du Kremlin a salué avec insistance la » position réfléchie et clairvoyante » des Turcs, qui » n’ont pas sacrifié leurs intérêts aux ambitions politiques d’autrui « . Il est vrai que l’embargo décrété à l’été 2014 par Moscou sur les produits alimentaires venus d’Europe a profité aux agriculteurs turcs qui ont eu tôt fait de se faire une niche, fournissant plus de produits laitiers, de fruits et légumes et de viande au marché russe. En récompense, et aussi parce que les prix du gaz sont indexés sur ceux du pétrole, actuellement à la baisse (- 27,5 %), Gazprom a accordé aux Turcs une ristourne de 6 % sur le gaz.
Mosquées tous azimuts
Moscou est le soutien le plus ardent au président syrien Bachar Al-Assad que le président Erdogan veut voir renversé. -Décrite par Iouri Ouchakov, le conseiller diplomatique du président russe, comme l’un des » thèmes importants » de la visite, la guerre en Syrie a donné lieu à une déclaration convenue du président Erdogan. » Nous avons certes des points de vue différents sur le dossier syrien mais nous sommes d’accord sur ce qui pose problème « , a-t-il indiqué.
La coopération énergétique et le refus de la domination occidentale ont eu raison des désaccords sur la Syrie.
L’autre sujet qui fâche, à savoir le sort des Tatares de Crimée, persécutés par les autorités prorusses misent en place dans la péninsule, n’a presque pas été abordé. La partie russe s’est contentée de répéter que les droits de la minorité musulmane de Crimée, entièrement déportée par Staline en 1944, étaient respectés.
Moscou, qui vient de déclarer Sébastopol » zone économique libre « , joue sur la corde sensible du président turc : la construction de mosquées tous azimuts. Une semaine avant la visite de M. Poutine, le nouveau chef de la communauté tatare mis en place par Moscou, Remzi Illiasov, avait proposé aux Turcs de venir construire une nouvelle mosquée à Simféropol, ce qui reviendrait de facto à reconnaître l’annexion de la péninsule. Pour le moment les autorités turques n’ont pas donné suite.
« Dépendante à 50 % du gaz russe, la Turquie veut s’en affranchir en construisant 80 centrales thermiques (dont une vingtaine au charbon) et trois centrales nucléaires. Le géant russe Rosatom a emporté l’appel d’offres pour construire la première, celle d’Akkuyu, dans la région de Mersin, au sud. Ce contrat d’une valeur de 20 milliards de dollars (16 milliards d’euros) inquiète les écologistes turcs, qui rappellent que la zone est sismique. A la veille de l’arrivée du président russe à Ankara, le ministère turc de l’environnement a avalisé le démarrage du chantier. »
Une centrale nucléaire en face de Chypre, encore un projet Erdoganien à l’encontre de toute décence.