Symbole de la division de l’île, une artère de Nicosie est rouverte 4 avril 2008
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Le Temps (Suisse), 4 avril 2008
Delphine Nerbollier, Istanbul
La rue Ledra, fermée depuis quarante-cinq ans, est le deuxième passage piétonnier ouvert dans la capitale entre les Chypriotes grecs et turcs. Nouvelles négociations prévues à partir de juin.
La rue Ledra est étroite mais, jeudi à 9 heures du matin, la foule s’est engouffrée avec émotion là où, depuis quarante-cinq ans, des barricades bloquaient le passage. Les maires grec et turc de cette capitale – la seule encore divisée d’Europe – ont célébré côte à côte, par un lancer de ballons, la réouverture au public de ce qui était auparavant le cœur de Nicosie.
En 1963, à l’époque des conflits entre communautés chypriotes grecque et turque, la très commerçante rue Ledra, qui traverse la ville du nord au sud, fut coupée en son milieu par les premiers fils barbelés. Onze ans plus tard, en 1974, au moment de l’intervention militaire turque dans le nord, cette artère est devenue le symbole de la division de l’île. Sa réouverture a été qualifiée hier de symbole «historique».
Herbes folles
Preuve toutefois de la méfiance qui règne encore entre les deux partie, un incident a éclaté en début de soirée. En raison d’une patrouille intempestive de la police chypriote du nord dans une section de la rue, la rue a été «temporairement» fermée.
La décision de rouvrir la rue Ledra a été prise il y a à peine deux semaines par le nouveau président de la République, Dimitris Christofias, élu en février, et par son homologue, Mehmet Ali Talat, président de la République turque de Chypre du Nord (autoproclamée en 1983 et reconnue par la seule Turquie). Les 70m de no man’s land, où avaient poussé des herbes folles, ont été déminés par l’ONU, et les bâtiments non entretenus ont été sécurisés. La rue Ledra est désormais le deuxième point de passage piétonnier de Nicosie.
«Cette ouverture est symbolique, mais elle n’aura aucun impact important si elle reste isolée», nuance Ahmet Sözen, professeur à l’Université de Magosa (Famagusta) au nord de l’île. En effet, la création d’un nouveau point de passage entre le nord et le sud ne devrait pas bouleverser les habitudes des Chypriotes. Depuis 2003, il existe cinq autres «postes frontières» le long de la «ligne verte» et, malgré cela, les relations entre les deux communautés restent tendues. Selon une étude des Nations unies, 40% des Chypriotes grecs ne sont jamais passés dans le nord depuis quatre ans, contre 30% pour les Chypriotes turcs.
«Solution juste et durable»
Après quatre années stériles au plan politique et la crainte croissante que la division ne devienne permanente, les deux leaders chypriotes ont pris le taureau par les cornes, dans une opération qualifiée par beaucoup comme celle «de la dernière chance». Le 21 mars, ils se sont engagés à entamer de nouvelles négociations, dès la fin juin. Echaudées par l’échec du plan de paix de 2004, pour lequel l’ex-secrétaire général Kofi Annan avait ardemment milité, les Nations unies se sont réjouies de ce ton «très positif». «Les deux leaders ont montré leur envie d’arriver à une solution juste et durable et je pense que les Chypriotes ont le droit d’avoir des attentes», s’est félicité mardi le secrétaire général adjoint pour les affaires politiques de l’ONU, l’Américain Lynn Pascoe. Dans ce contexte, l’ouverture de la rue Ledra n’est donc rien de moins que le premier pas concret réalisé depuis quatre ans en direction de la paix.
Du côté de la Turquie, le chef d’état-major, qui dispose de 40000 soldats dans la partie nord de l’île, s’est lui aussi félicité, à sa manière, de la reprise du dialogue, lors d’une visite le week-end dernier sur l’île. Mais il a aussi fait grincer les dents de Dimitris Christofias. «Ce n’est pas parce qu’un accord de paix sera trouvé demain que nous retirerons nos troupes après-demain, a déclaré le général Buyukanit. L’armée doit observer et être entièrement convaincue de la sécurité des Chypriotes turcs.»
La rue Ledra, à Nicosie
Le geste marque une étape symbolique importante dans de longs efforts de réunification insulaire: Chypriotes grecs et turcs ont rouvert jeudi la rue Ledra, ce symbole puissant de la partition de l’île au cœur de Nicosie.
La rue Ledra (rue Lokmaci en langue turque) est une grande artère commerçante piétonnière, éminemment touristique, qui traverse le centre historique de Nicosie du nord au sud. Barricadée depuis 1963 jusqu’à hier, elle se charge d’une portée symbolique supplémentaire, puisqu’elle est désormais un nouveau point de passage entre le sud et le nord de la capitale de Chypre. Une île qui est divisée, rappelons-le, depuis 1974, à la suite de l’invasion et de l’occupation par l’armée turque de son tiers nord après une tentative de coup d’Etat contre le président Makarios.
Bordée aujourd’hui d’une multitude de boutiques, bars et restaurants, la rue Ledra débouche sur la «ligne verte» qui traverse Nicosie de part en part, la zone tampon administrée par les Nations unies. Ce secteur urbain avait été surnommé le Murder Mile lors de la lutte pour l’indépendance chypriote à la fin des années 1950, puisque c’est là qui y étaient concentrées les nombreuses attaques contre les forces de l’Empire colonial britannique.
Le centre historique de Nicosie s’élève sur le site d’une cité du IIe millénaire avant J.-C., mais la ville n’est devenue la capitale de l’île qu’au XIe siècle de notre ère. Les Lusignan y construisirent un palais royal et une cinquantaine d’églises gothiques. Le cœur de la cité est enfermé dans les murailles vénitiennes du XVIe et abrite des musées, des églises, des monuments médiévaux. Connue d’ailleurs en tant que Ledra ou Ledrae dans l’Antiquité, Nicosie a été conquise par Richard Cœur de Lion lors de la troisième croisade en 1191, est devenue possession des Vénitiens en 1489, avant de tomber aux mains des Turcs en 1571.
est il conseille d’ aller en chypre du nord pour aller y travailler